Liminaire
Quand le monde sous tes pas se dérobe
Et que pris de vertige
Tu cherches un sens, dis :
Nous sommes les porteurs de feu
Qui chancèle à l’orée du jour clair
Nous sommes de ceux que la lumière aveugle
Et préserve de l’ultime écueil
Nous sommes le vent
Nous sommes le cratère
Dont la patience germe comme une fleur de terre
Sans nous point de perle dans le creux d’une vague
Quand doucement s’endort une étoile
Sur le sein géant de l’océan
Seuils obscurs
Extérieur, jour
Un oiseau dans le ciel
Comme un phare,
La nuit sera belle
S'il plaît à Dieu
M'émeut plus que toutes choses
Le peu de sens que recouvre l'approche
L'humeur du moment et le mâle présage.
Extérieur, jour
Le soleil est une plaie béante
Sur la conscience qui doute
Peu d'hommes savent
Et ceux qui savent se taisent
Du lointain comme d'un autre monde
L'œil regarde et fixe le talon droit d'un pied
La femme, non loin de là, apparaît
Forme vague
À peine perceptible.
Seuils obscurs (suite)
Extérieur, jour
L'œil se tasse et patiente
Ceux dont le soufre constitue
La nourriture familière
Se terrent et chuchotent sur la gravité de l'heure.
Et l'homme est une forme précise
Sur la conscience du jour.
Plus près de l'homme,
L'œil regarde
Exclut et donne sens
Qu'en est-il de ce qui
En ce lieu même se dérobe ?
Qu'en est-il de la palme bercée
De l'éternelle menace
Et qui pèse de son poids d'ombre
Sur le poussin barbare ?
Qui parle endosse le manteau de dire
La fourrure en est belle
Le col étroit
Et que dira-t-il
Sinon l'épidermique soubresaut
De ce qui au fond de chaque chose gît ?
Seuils obscurs (fin)
L'audience s'entend
Et le poème se pare
De la trame invisible du jour
Extérieur, jour
Et la marque du temps
Est un gond rouillé
Et qui grince fidèle au seuil
Sa part d’inconnu.